AMARAVATI (ÉCOLE D’)

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AMARAVATI (ÉCOLE D’)

À l’est du plateau indien du Dekkan, la région comprise entre la basse God var 稜 et la basse Krsn a livré de nombreux vestiges qui attestent que, dans le royaume Andhra, aux premiers siècles de notre ère, fleurissait un art bouddhique des plus importants, très répandu et de haute qualité.

Les pièces exhumées à Jaggayyapeta, Ghant sala, Amar vat 稜, N g rjunakonda, Goli – pour ne nommer que les sites les plus connus –, et qui actuellement sont pour la plupart conservées dans les musées de Madras, de N g rjunakonda, de Londres (British Museum), présentent une telle communauté de caractères que les archéologues les considèrent comme formant un style, ressortissant d’une même école dite de l’Andhrade ごa (région des Andhra) ou d’Amar vat 稜. Amar vat 稜, sur la Krsn , fut non seulement un des centres politiques du royaume mais aussi un intense foyer de vie religieuse, avec ses moines, ses pèlerins et son grandiose st pa.

Les œuvres

Le st pa est l’édifice religieux par excellence du bouddhisme. Il était constitué, aux époques anciennes (par exemple à S ñc 稜), d’une base cylindrique sur laquelle reposait, en retrait, un dôme hémisphérique surmonté d’une structure quadrangulaire et d’une hampe à parasols; il était entouré, au-delà d’un espace circulaire permettant le rite circumambulatoire de la pradaksin , d’une barrière (vedik ) percée d’une ou de quatre ouvertures orientées, pouvant être surmontées de portiques (torana ). À ces périodes, seuls les torana, et parfois la vedik , sont ornés de sculptures.

Les st pa de l’Andhrade ごa conservent la même architecture générale. Cependant, certains (notamment à N g rjunakonda, Goli) ne sont plus entourés de vedik ; ils n’ont pas, quand la vedik existe, de torana, la barrière faisant seulement retour, à angle droit, aux ouvertures, elle est à cet endroit surmontée de lions. Ils possèdent tous une adjonction caractéristique: un groupe de cinq piliers s’élevant, aux quatre points cardinaux, sur une avancée de la base. Enfin, ils sont richement décorés, non seulement sur la vedik éventuelle mais par des dalles de pierre sculptées, plaquées sur la base et même sur le dôme. Si les st pa monumentaux (le grand st pa d’Amar vat 稜 devait atteindre 50 m de haut) nous manquent, détruits par le temps et par les hommes, des reproductions sculptées sur les dalles nous permettent de voir ce que furent leur configuration et leur ornementation.

Les monuments furent édifiés, et aussi transformés, au cours des ans; les reliefs, souvent offerts en ex-voto par des fidèles, étaient sculptés dans le marbre selon les besoins des fondations religieuses, des agrandissements, des améliorations, etc. On trouve des plaques qui ont été remployées, et dont les deux faces présentent des sujets et des techniques différentes. Aussi constatons-nous que, parmi les vestiges qui subsistent, certains rappellent l’art Sunga de Bh rhut-S ñc 稜 et d’autres, à l’extrême, l’art Gupta. Les œuvres de l’école d’Amar vat 稜 s’étagèrent sur plus de trois siècles, du Ier de notre ère au début du IVe, sous les dynasties des S tav hana et des Iksv ku.

Les rondes-bosses retrouvées restent rares; elles figurent principalement le Buddha. Les bas-reliefs s’ornent de scènes ou de motifs décoratifs. Ceux-ci, souvent chargés de signification, utilisent le lotus, le makara (monstre aquatique), les animaux, les représentations architecturées (de st pa, vedik , torana), etc. Les scènes illustrent les traits typiques de «vies antérieures» (J taka ) du Buddha et, surtout, retracent les épisodes de sa dernière existence, terminée par l’Extinction totale (Parinirv na ). Le Buddha y est représenté soit corporellement, soit par un symbole: lotus, arbre, roue, trône, st pa, etc. La manière aniconique rappelle celle qui fut employée jusqu’au Ier siècle de notre ère. Mais elle ne suffit pas à fonder – comme on l’a parfois tenté – une chronologie des œuvres de l’école d’Amar vat 稜. En effet, s’il est certain qu’un relief représentant le Buddha sous forme humaine ne peut être antérieur au Ier siècle, moment où cette façon de le figurer apparaît au Gandh ra (art gréco-bouddhique) et à Mathur , en revanche un relief représentant le Buddha sous forme symbolique peut fort bien être assez tardif (ce que décèlent d’autres caractères), et certains reliefs portent simultanément les deux iconographies. D’ailleurs, les sculpteurs de l’Andhrade ごa, pour figurer le Parinirv na, conservèrent le st pa, ne recourant jamais au Buddha couché. Lorsque le Buddha se présente corporellement, il a un visage rond et il est coiffé de courtes boucles plates. Son vêtement découvre une épaule et tombe en larges plis ou, parfois, couvre les deux épaules et se drape en plis concentriques. Assis ou debout, tenant généralement d’une main un pan de sa robe, il lève la droite dans le geste qui rassure (abhaya-mudr ). Plus rarement il est assis, genoux écartés, mains placées dans le giron l’une sur l’autre: geste de la méditation (sam dhi-mudr ). Son siège peut comporter des éléments zoomorphes, et est parfois constitué par les replis d’un serpent (n ga ) dont les têtes forment une auréole au-dessus de celle du Buddha.

L’évolution de la sculpture

C’est par une analyse stylistique des détails de la décoration qu’on est parvenu à retrouver l’évolution de la sculpture de l’Andhrade ごa et à replacer ainsi les pièces qui nous restent les unes par rapport aux autres. Des motifs décoratifs comme le makara, la vedik figurée, le st pa figuré, le trône, le rinceau, la guirlande, le médaillon lotiforme, etc. possèdent des éléments qui changent, se transforment, alors que d’autres demeurent stables – avant de se modifier éventuellement à leur tour. Une étude détaillée et comparative permettra d’abord de constituer une «chaîne» pour chaque motif, les maillons extrêmes devant s’accrocher aux formes Sunga et aux formes Gupta; ensuite de confronter ces différentes chaînes, leur faisceau et leurs recoupements établissant l’évolution stylistique.

Quatre grandes périodes ont pu ainsi être distinguées dans le style d’Amar vat 稜. Les vestiges qui ont été exhumés à Amar vat 稜 même appartiennent à toutes ces périodes, preuve évidente de l’importance et de la vitalité de ce centre. Ceux de Jaggayyapeta sont de la première période, ceux de Ghant sala de la deuxième, ceux de N g rjunakonda, Goli, de la troisième et surtout de la quatrième; certains de ces derniers reliefs, portant des motifs nouveaux, apparentés aux Gupta, pourraient être encore plus tardifs.

On peut aussi observer que, bien que membres d’une même famille stylistique, les différents sites présentent quelques nuances dans la décoration, qui sont susceptibles de les différencier.

Le style de l’Andhrade size=5ごa

Quoi qu’il en soit de ces fluctuations dans le temps et dans l’espace, il reste que l’école d’Amar vat 稜 constitue un ensemble cohérent, un tout qui possède une forte personnalité et qui eut une grande influence sur l’art indien.

Certes, cette personnalité s’est formée aux anciennes leçons de Bh rhut-S ñc 稜, mais n’en fut pas moins attentive à ce qui se faisait dans l’Inde, au Gandh ra, à Mathur , etc. Elle eut des contacts avec l’Occident, soit indirects, par l’antique voie du nord-ouest et des royaumes «hellénisés», soit par voie maritime et «romaine»; des fouilles ont confirmé l’existence de ports romanisés sur la côte sud-orientale de l’Inde et l’activité des échanges commerciaux. Ces ouvertures expliquent, en particulier, les modifications dans l’architecture du st pa (disparition de la vedik ) issues du Gandh ra ou de Mathur , l’apparition de motifs iraniens, hellénistiques, romains, comme la guirlande soutenue par de petits personnages, le trône aux lions, le trône supporté par des pattes de fauve, le rinceau d’acanthe à tiges minces.

Mais l’Andhrade ごa a trouvé, forgé, fait resplendir un grand style. L’architecture manifesta, avec une floraison de st pa, dont certains sont imposants, une ampleur dont on n’a plus, sur les reliefs, que les reflets. Une technique sculpturale très sûre s’affirma. De grands médaillons (et demi-médaillons) traduisent le symbolisme du lotus dans des rangées multipliées de pétales; les fleurs se détachent souvent sur de larges feuilles ondulées, dentelées, se recourbant en crochets, du plus heureux effet. «Vases d’abondance» d’où jaillit et s’épanouit un feuillage, «st pa figurés», admirablement ouvragés, symbolisant le Parinirv na ou plus généralement le Buddha et son enseignement, guirlandes en gros rouleaux, rinceaux feuillus, torsades frangées, perlages; tout, des plus complexes ensembles aux plus infimes détails, témoigne d’une décoration parvenue à un extrême raffinement, mais dont la richesse ne compromet jamais un équilibre mesuré. Des animaux se meuvent, débordant de vitalité et de fantaisie. Les scènes allient à une savante composition, un dynamisme puissant. Les corps, galbés en lignes très pures, se courbent avec grâce ou manifestent leur ardeur. Peut-être la qualité majeure de cet art d’Amar vat 稜 est-elle cette union d’antagonismes équilibrés, ce «couple de forces» que forment le jaillissement renouvelé de la vie, rendu par les descriptions familières, par le mouvement des corps, et l’élan de la spiritualité, qu’évoquent la sérénité du Buddha ou l’appel de son symbole, la pureté des formes, la retenue dans les gestes et dans l’ordonnance générale.

En outre, nombre de reliefs apportent une information, particulièrement détaillée et fidèle, sur la vie de l’époque, à la cour royale, à la maison, dans les rues, en forêt, sur les constructions publiques et privées, sur le mobilier, les costumes et les parures, les moyens de transport, sur l’activité culturelle autour des st pa, etc. Complétés par des inscriptions lapidaires qui font état de fondations et donations pieuses, ils constituent une source précieuse pour la connaissance du bouddhisme. On peut ainsi trouver trace de transformations, voire d’innovations, survenues dans la pensée religieuse. N’oublions pas que c’est à ce moment que se fit jour et que s’établit la conception d’un Buddha qui n’est plus seulement le Maître humain enseignant le chemin de la Connaissance, mais un Être transcendant, placé même au-dessus des dieux (dev tideva ).

L’école d’Amar vat 稜 a rayonné dans l’Inde, et au-delà. Sa marque se décèle, notamment, sur les ivoires de Begr m, dans les reliefs de K rl 稜, de N sik, de K nheri, de Pithalkor , ou encore dans la formation et le développement de l’art de Ceylan. Et le long des routes vers l’Extrême-Asie, certains thèmes iconographiques, des formes plastiques, des motifs décoratifs, témoignent de son prestige et de son influence.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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